HACHEMI Chékéba
L’INSOLENTE DE KABOUL, ÉD. Anne Carrière, 2011, 277 pages
Récit très touchant d’une auteure qui s’est impliquée politiquement dans la restauration de la démocratie dans son pays. Ce roman m’a permis de connaître l’histoire contemporaine de l’Afghanistan, de ses dirigeants, de son peuple, de ses moeurs et modes de vie, des conflits avec la Russie.Un grand roman qui nous décrit un peuple soufffrant et abusé par ses voisins et ses dirigeants.
Gilles Lagrois, Auclair, Québec
Citations :
« …cela me ramène à une tare de mon pays : les rivalités ethniques, les clans, les tribus, les classes sociales étanches, le mépris communautaire. Ces faiblesses nous ont déjà tellement coûté, et elles restent un obstacle majeur à la construction de ce grand Afghanistan moderne pour lequel je me bats. » p.158
« …aucun spécialiste de l’Afganistan n’a jamais pu approcher mon pays par le prisme de la féminité. Parler de ces années de guerrre en donnant la parole aux mères, aux épouses, aux sœurs, aux filles…Aucun homme n’aurait pu en rêver. Aucun, mais nous ? Peu convenable, mais pas impossible! P. 160
« Le plus dur face à la corruption, ce n’est pas de résister à la tentation, c’est l’usure ressentie quand il vous semble que tout le système est gangrené, »
« Quand un homme politique construit sa maison, c’est qu’il a vendu un peu de son pays. S’il veut construire son pays, il lui faut vendre sa maison. » p. 240
« L’humanitaire ne sera jamais qu’un palliatif à l’absence de politique, je le sais pertinemmeent, mais un puits, c’est de l’eau à boire, et une victoire contre tant de maladies liées au manque d’hygiène. C’est concret. Cela aide des familles. Cela ne change rien à l’état d’un pays. » p. 254
Pour en savoir davantage :
« C’’est l’histoire d’une femme qui a traversé une montagne seule quand elle était enfant. Et en a soulevé mille depuis.
Chekeba Hachemi est née en 1974 à Kaboul dans une famille bourgeoise et influente. Elle a onze frères et sœurs. Son père était gouverneur, un homme proche du peuple, qui est mort quand elle avait deux ans, mais qui a toujours incarné son modèle.
À l’âge de onze ans, alors que sa mère décide que leur tour est venu de fuir l’occupation soviétique, Chekeba se trouve séparée d’elle et va traverser la passe de Khaibar avec un passeur menaçant. Onze jours de terreur, dans les montagnes, qui lui ouvriront les yeux sur la réalité de la violence de l’occupation russe.
En 1999, Chekeba décide qu’il est temps de rencontrer ce Massoud pour lequel l’association qu’elle a créée, trois ans plus tôt, récolte des fonds en vue d’ouvrir des écoles dans le Panshir. Elle redécouvre son pays plongé dans la guerre et devient proche du célèbre commandant, qui voit en elle une aide précieuse pour sensibiliser la communauté internationale à la lutte contre les talibans.
En septembre 2001, Massoud est assassiné, les tours tombent, les talibans sont défaits ; Chekeba entre dans Kaboul libéré et devient la première femme diplomate afghane en poste à Bruxelles.
En 2005, elle est nommée conseillère auprès du vice-président à Kaboul. Puis, en 2007, ministre-conseiller à Paris.
En 2009, après avoir dénoncé la corruption, et lassée de constater qu’aucun changement ne répond à son appel, elle décide de donner sa démission »
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Le point de vue de Patryck Froissart
Titre: L'insolente de Kaboul
Auteur: Chékéba Hachémi
Editeur: Anne Carrière 2011
ISBN: 978-2-8433-7570-5
278 pages
« Récit autobiographique d'une Afghane devenue française qui se bat depuis toujours pour son pays en général et pour l'amélioration de la condition des femmes en particulier.
L'histoire commence lorsque Chébéka, tout juste âgée de huit ans, quitte clandestinement Kaboul vers le Pakistan, d'abord avec sa mère puis seule, avec un passeur et un groupuscule de kaboulis fuyant l'occupation soviétique.
Dès le départ le lecteur est pris dans les péripéties d'une vie qui ne va plus cesser, particulièrement dès que la jeune fille devient femme, de se dérouler à un rythme haletant, dans une succession de voyages entre la France et l'Afghanistan, dans une série étourdissante d'actes militants, dans un réseau impressionnant que Chébéka tisse patiemment, infatigablement, et qui la met en relation intime avec les plus célèbres commandants afghans (dont Massoud) et des personnalités politiques françaises, afghanes, belges, européennes de premier plan.
Le style est alerte, sans fioritures: le romanesque, la poésie n'ont pas leur place ici. Le réalisme est de mise, parfois terrible, souvent sordide, fréquemment exaltant. La rapidité narrative reflète l'allure trépidante de Chébéka dans la course en avant qu'elle mène pour essayer d'inverser, de contrarier, ou d'accélérer le cours de l'histoire d'un pays où tout va, elle finit par le constater un tant soit peu désabusée, de mal en pis.
Même si son combat, quotidien, épuisant se heurte jour après jour à des obstacles toujours renouvelés, même s'il semble aboutir à un triste échec, Chébéka Hachémi, indéfectiblement attachée par l'ombilic à son pays d'origine, viscéralement proche de ses compatriotes humiliées et persécutées, reste, à l'heure où paraît ce livre, engagée dans une action individuelle et collective qui force l'admiration.
Lecture incontournable!
Patryck Froissart
Saint-Paul, le 12 janvier 2011, www.critiqueslibres.com