POITRAS Marie-Hélène
SOUDAIN LE MINOTAURE, roman, Triptyque, 2009, 152 pages
Deux situations de vie d’agression, l’une par un agresseur, un violeur de femmes et la seconde par une victime refusant de passer sa vie en étant associée à une pauvre victime qui se fait plaindre et dorloter.
« Tout à l’heure, j’ai senti combien l’agression m’avait fragilisée. »
« J’avais des fantasmes de violence : j’étais décidée à le faire payer, au nom de toutes les presque étranglées de la terrre. Tout s’est déroulé dans ma tête à l’intérieur d’une seule seconde.» p. 133
« À mon grand désarroi, je développe des réflexes territoriaux, un « sens de la propriété », dirait l’immoraliste d’André Gide. » p. 147
Un roman touchant qui parfois nous déstabilise par le contenu et le style spontané et blessé non pas d’une victime mais d’une témoin.
Gilles Lagrois, Auclair, Québec
Pour en savoir davantage :
Les perceptions d'une victime et de son bourreau
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4e de couverture : Novembre, un soir de neige et de violence. Dans un appartement de Montréal, une rencontre qui n'aurait jamais dû avoir lieu. Le quotidien bouleversé par l'arrivée d'un être venu apporter la peur en cadeau. Quelques mois plus tard, depuis le fond de sa cellule, Mino Torrès décharge son fiel. Quant à Ariane, c'est entre Munich et Berlin qu'elle renoue avec ses sens. Deux versions complémentaires d'un brusque corps-à-corps.
Mon avis : Comme premier roman, il demeure tout à fait surprenant. D'abord par le choix de la narration, mais surtout par la qualité introspective que possède l'auteur pour incarner Mino Torrès, le violeur. Être capable de porter un tel regard sur les femmes, exprimer ce bouillon d'émotions brutes, violentes et très complexes. Pour cela, je lui lève mon chapeau.
Pour la partie d'Ariane, j'ai bien aimé la réflexion sur la victimisation ou plutôt, le malaise entourant une victime d'un acte de violence. Comment y réagir, comment notre réaction peut devenir malsaine en voulant bien faire. J'ai bien aimé aussi cette partie. On ne tombe pas dans le mélodramatique. L'émotion est bien dosée, mais il y a un petit hic. C'est peut-être une question de perception, mais je me suis senti un peu éloigné du récit, comme si un voile empêchait un contact plus ténu, ce qui donne l'impression de vivre tout ceci à distance.
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« Novembre, un soir de neige et de violence. Dans un appartement de Montréal, une rencontre qui n'aurait jamais dû avoir lieu. Le quotidien bouleversé par l'arrivée d'un être venu apporter la peur en cadeau.
Quelques mois plus tard, depuis le fond de sa cellule, Mino Torrès décharge son fiel. Quant à Ariane, c'est entre Munich et Berlin qu'elle renoue avec ses sens.
Deux versions complémentaires d'un brusque corps-à-corps. » Par l’éditeur.
[Extrait]
« Elles ouvraient les jambes. Eduardo et Leandro avaient gagé sur Manuel et moi. On prenait place avant le début de la course. Leandro était de mon côté. C'était l'équipe Leandro-Mino montée sur Conchita contre Eduardo-Manuel et leur jument Victoria. Je ne voulais pas être là. Manuel a atteint la ligne d'arrivée en moins d'une minute. Quant à moi, j'avais l'impression de m'engouffrer dans une blessure ouverte, de tomber dans une mer de chair tiède. Je regardais le volcan, les seins immenses de Conchita, les pétillements phosphorescents se précipitant hors de la bouche de l'Arenal, j'entendais les beuglements de Leandro, les gémissements de Conchita et faisais tout en mon possible pour ne pas voir ses yeux.
Tous mes muscles s'étaient raidis. Mes mouvements m'apparaissaient ridicules, répétitifs et dignes de colère. J'avais le sentiment que ce n'était pas exactement ce qu'il fallait faire. Que je m'exécutais comme un lézard, que je remuais du milieu du corps à la manière d'une balançoire tordue. Conchita était comme un animal abattu, qui expulse ses derniers jets d'air. Ce duvet à la gorge qu'elle m'offrait sans scrupule. Ses yeux révulsés, à faire peur. Et Maria qui devait encore vendre des fruits confits dans un parc bordélique. Je pensais à ces choses pour oublier mon sexe avalé par le ventre de Conchita. Il m'a semblé que j'avais atteint un point de non-retour.
Je continuais et n'allais nulle part. Je pensais à autre chose pour anesthésier ces sensations. C'était trop intime pour être étalé à la vue de Leandro, d'Eduardo, de Manuel et de Victoria qui replaçait sa jupe, tout près. Mon corps entier était gonflé, des fleuves de sang déferlaient dans mes veines, à grands flots, pour m'irriguer le sexe. Il m'a semblé que la scène se poursuivrait jusqu'à l'infini. J'allais être malade. »
La suite dans le livre….www.lactualite.com