CHALANDON Sorj
LE QUATRIÈME MUR, roman, Éditions Grasset &Pasquelle, 2013, 327 pages
" LE livre de la rentrée auquel on aurait dû donner le Goncourt, le Renaudot, le Médicis, l'Interallié et pourquoi pas le Fémina..." Pierre Foglia, La Presse, Québec, Canada
Il a cependant remporté le Prix Goncourt des Lycéens 2013
Un roman brillant, émérite, remarquable autant par le style d'écriture élevé, pur de l'auteur que par la composition imposante, maîtrisée de l'histoire de base du roman. Une composition théatrâle élaborée car il s'agit d'un projet de mise en scéne d'ANTIGONE de Jean ANOUILH présentée par temps de guerre au Liban, début des années 1980.
Telle une mise en scène de théâtre l'auteur nous met en projet, nous intègre à son élaboration, personnage par personnage, scène par scène , nous connaissons le but et les moyens à prendre pour le réaliser.
Un projet rassembleur, de tolérane, de paix en temps de conflit, de guerre dans une région dominée par des groupes religieux asservis par des haines ancestrales: Les Libanais, les Phalangistes, les Palestiniens, les Chiites.
Antigone est une tragédie d'origine grecque de Sophocle. Les guerres sont des tragédies.
Chaque guerre a une fin tragique et brutale.
Les combattants de toutes allégeances tuent des populations entières et se font aussi illiminés. La loi du Tallion, oeil pour oeil, qu'il s'agisse d'enfants, de femmes, de vieillards de part et d'autre. La haine engendre la haine, l'extermination, la mort.
" Leurs enfants, qui seront nos ennemis demain. Leurs vieillards. Allons-y ! Les laisser vivre, c'est renforcer leurs rangs. Pensez aux martyrs de Damour. Sang pour sang."
" L'antinationalisme. C'est le luxe de l'homme qui a une nation."
" Le quatrième mur, c'est ce qui empêche le comédien de baiser avec le public. Une façade imaginaire, que les acteurs construisent en bord de scène pour renforcer l'illusion. Une muraille qui protège leur personnage. Une clôture invisible, qu'ils brisent parfois d'une réplique s'adressant à la salle."
" Faire sourire le prolétariat était une bagarre comme une autre."
" Nous étions frères de violence. Alors non.Ne pas crier à la férocité. Surtout pas. Racisme, antisémitisme, mépris de l'autre. Leur idées étaient des menaces à combattre. Comme leur haine du présent, leur dégoût de l'égalité, leur aversion de la différence. Tout cela est de la sauvagerie pure."
" Je défendaiss un projet que je n'avais pas initié mais j'exécutais les dernières volontés d'un mourant. Et pour lui, cet homme, cet ami, ce frère, j'étais prêt à prendre tous les risques."
" Jouer un rôle est mentir. C'est lié au péché. Il estime que celui qui imite un groupe sera considéré comme faisant partie de ce groupe."
Un roman brillant. Un auteur remarquable à découvrir sans faute.
Gilles Lagrois, Auclair, Québec
www.livresentete.vip-blog.com
Pour en savoir davantage:
"Jeune étudiant gauchiste et pro-Palestinien, le narrateur a pour meilleur ami un juif grec amoureux de théâtre, Sam. Malade en phase terminale, ce dernier lui soumet comme dernière volonté de montrer la pièce «Antigone» de Jean Anouilh à Beyrouth, en 1982, alors que la guerre civile fait rage. Le projet est insensé, fou, magnifique: permettre le temps d'une représentation de réunir sur scène des Chrétiens, des Chiites, des Palestiniens ou encore des Druzes."
"Son dernier roman en date est une oeuvre d'une force rare qui parvient à mêler la petite histoire à la grande Histoire, l'intime à la politique et la tragédie grecque revisitée par Jean Anouilh à la guerre civile au Liban. «Le Quatrième mur» évoque aussi la désillusion d'une génération et sonne la perte des valeurs morales et idéologique face à l'absurdité et l'horreur du monde. C'est souvent d'une beauté à pleurer - surtout lors des passages au Liban -, et quand il nous fait vivre le jour d’après le massacre des camps palestiniens de Sabra et Chatila commis à Beyrouth en 1982, on a la gorge nouée et la rage au ventre. Une envie d'hurler le désespoir du monde comme le héros du roman."
"Sorj Chalandon a obtenu ce jeudi le très réputé Goncourt des lycéens pour «Le Quatrième mur», aux éditions Grasset. Une juste récompense pour le journaliste, ancien reporter de guerre pour «Libération» de 1973 à 2007, prix Albert-Londres en 1988 et qui écrit depuis 2009 dans «Le Canard enchaîné».
"On ne sort pas indemne du dernier livre de Sorj Chalandon"
"Humaniste, oui, parce qu’en n’esquivant rien de l’atrocité et de la brutalité des actes des homme, Sorj Chalandon, qui donne beaucoup de lui-même à son personnage Georges, réussit au cœur de ce désastre humain à faire survivre la bonté ( ce n’est pas un gros mot ni un mot niais) et l’espoir.
De la première page à la dernière, mon cœur a tapé fort et mon ventre m’a fait mal, mais pas seulement dans la description de la réalité de l’horreur de la guerre, celle de l’enfer du martyr des femmes, vieillards et enfants de Chatila, ni celle de la violence ordinaire des combats d’idées, ou de la haine que l’on trouve toujours à justifier au nom de l’engagement et des convictions, non, pas seulement donc car l’écriture est si acérée, que chaque mot, chaque geste, précis et sobres font mouche. Chalandon balance les mots comme les snipers les balles, sans qu’on s’y attende, mine de rien au détour d’une phrase leur puissance nous fait vaciller."
"Ce livre fait partie des textes essentiels, profondément humanistes que l’on oublie jamais et qui devraient aider à guider les consciences et combattre les certitudes. A employer aussi les bons mots et les bonnes expressions. Par exemple, comprendre qu’entre le slogan "Palestine vaincra" et "Palestine vivra" , il y a une différence avec toutes ses composantes. Et que celui qui hurle CRS SS n’a certainement jamais rencontré le nazi Alois Brunner." www.salon-litteraire.com