BRITT Fanny
LES MAISONS, roman, 2015, 221 pages, Cheval d'août, Québec,
Un premier roman intimiste car nous pénétrons sans honte dans la vie de TESSA et de JIM, son mari et son deuxième amour. Le récit de la vie d'une femme qui nous dévoile en toute confiance sa vie comme une confidente et vieille connaissance intime.Une rencontre avec une femme au quotidien presque.
Avant JIM , après JIM. Ses enfants. Sa vie de femme, de femme de carrière.Ses habiletés. Ses faiblesses. Sa façon de percevoir la vie, celle qu'elle a vécu, d'analyser sa vie à chaque étape importante et marquante.
Un premier roman réussi, d'une réelle qualité d'écriture. Une auteure à suivre de près.
Gilles Lagrois, Auclair, Québec
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"-Ça va tes affaires? Tu peux te permettre de perdre un client?
-Pas de soucis, vieux con. J'ai trente-sept ans. J'ai trois enfants. Trois enfants. Je suis criblée de peau molle.
-Bah, moi j'ai toujours bandé mou, de toute manière."
"Ce qu'il y a avec les mains de JIM, c'est qu'elles sont miraculeuses. Grandes et coussinées comme des pattes d'ours, les ongles rongés. Ses mains m'entourent et m'engloutissent et avec elles toutes les moiteurs deviennent obéissantes."
"... n'ai-je droit à un semblant de dignité?"
"Attendre.Pressentir avec effroi et exaltation qu'on en espère autant, que la fièvre ne se guérit pas, qu'on est une chandelle fondue..."
"Yo, maman t'es rendue une agente rock star."
"De l'Abitibi, il ne restait que des souvenirs furtifs, des images mortes et vite enfouies."
"... un homme qu'on prend par le ventre, on l'a pour la vie."
"Mais j'ai 15 ans!
Ça t'autorise pas à être une chipie."
"Une femme en pleine passion amoureuse n'est plus tenue de se plier aux règlements de son âge ou de sa situation, right? Elle est libre.
"-Ça ne te va pas bien le mépris.
- Ça ne te va pas bien, le paternalisme."
Pour en savoir davantage:
"Que feriez-vous si votre premier amour vous donnait rendez-vous dans trois jours ? Voilà le dilemme auquel sera confrontée Tessa, une mère de jeunes garçons, qui partage sa vie avec un conjoint attentionné. D'une part, elle pressent que cette rencontre pourrait anéantir les solides assises qu'elle a édifiées depuis quinze ans. Mais, d'un autre côté, le feu de cette passion avortée couve continuellement sous les cendres. le roman progresse telle une flèche tendue vers cette journée décisive.
Il y aura un appel caché, l'achat d'une robe étoilée, les souliers d'un autre âge ressortis timidement de l'armoire.
La force de Fanny Britt consiste à ancrer son récit dans une réalité quotidienne, brodée de menus détails, mais qui révèle l'universel grâce à une douce lumière impressionniste. Si le thème du désir d'adultère occupe une place centrale, l'auteure se penche aussi sur plusieurs sujets connexes : la maternité, le vieillissement, l'amitié, le décalage entre les rêves et la nature concrète des choses. Une sorte de monologue intérieur, néanmoins en phase avec les questionnements de la société actuelle. Pareillement à sa pièce de théâtre « Bienveillance », le premier roman de la dramaturge explore plusieurs couches de sens, tout en restant simple et fluide.
« Ce qui est étrange, c'est que j'ai beaucoup parlé à Francis, dans ma tête, depuis quinze ans. Il a assisté à la résolution de plus d'un conflit intérieur. Il suffisait de l'invoquer pour que tout mon fiel magnifique revête son plus beau costume à paillettes et s'empare du micro », observe Tessa avec la franche autodérision qui la caractérise. C'est donc à une réflexion sur les fantasmes que nous convie « Les maisons ».
Francis, l'ancien amant, reste une chimère, un fantôme omniprésent qui relie la narratrice à une version d'elle-même qui n'existe plus et qu'elle voudrait retrouver. L'invitation de cet homme permet à Tessa de renouer avec son passé et d'examiner ce que sont devenus les idéaux de ses vingt ans : sa carrière de chanteuse classique délaissée pour celle d'agente immobilière, son tempérament fougueux – mélange de Patti Smith et d'Emily Brontë – apaisé par les mains rassurantes de son mari.
Le ton oscille entre une perspicacité mordante et la nostalgie d'une époque révolue, de façon toujours très sentie. En fin de compte, le lecteur assiste au passage du temps, entre 1982 et 2004 ; au changement de la vision que cette femme porte sur elle-même et sur les gens qui l'entourent. Qui a dit que le triangle amoureux ne pouvait plus se réinventer ? Sûrement pas Fanny Britt, qui prouve ici que ce poncif vieux comme le monde peut mener à un portrait psychologique juste et touchant."
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