ZENITER Alice
L'ART DE PERDRE, roman, 2017, 506 pages, ****, prix Goncourt des Lycéens.
Un grand roman qui se déroule en ALGÉRIE et en FRANCE et couvre les années 1962, 1972, 2012, 2015 pour les membres d'une famille kabyle dont la narratrice, NAÏMA, le père HAMID et le grand-père ALI.
Une auteure au talent d'écriture remarquable qui nous émeut, nous ébranle pour en ressortir grandi.
C'est l'histoire d'un peuple, d'une famille sous l'occupation française dans les années 1960.La soumission se fait encore par l'argent. Triste mais vraie. C'est encore vrai.
Un roman imposant, intense, d'une époque près de nous.
Gilles LAGROIS, Auclair, Québec
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« Dans l'art de perdre il n'est pas dur de passer pour maître, tant de choses semblent si pleines d'envie d'être perdues que leur perte n'est pas un désastre.
Perds chaque jour quelque-chose. Puis entraîne-toi toi, plus vite. « Elizabeth Bishop
« --Personne ne t'a transmis l'Algérie. Qu'est-ce que tu croyais ? Qu'un pays, ça se passe dans le sang ?
Ce qu'on ne transmet pas, ça se perd, c'est tout. »
« HAMID...il ne s'agit plus de déchiffrer pas à pas un texte déjà écrit au ciel mais d'écrire le présent comme une histoire que les siècles futurs sauront lire. »
« Bosser, ce n'est que la mécanique simple pour accéder à l'argent. Sans passion. Sans attrait. »
« La maladie, finalement, est un risque comme un autre. C'est une des choses qui le forcent à aimer le fait d'être vivant. C'est violent une vie.La mienne, en tout cas... »
Pour en savoir davantage :
Résumé :
« L’Algérie dont est originaire sa famille n’a longtemps été pour Naïma qu’une toile de fond sans grand intérêt. Pourtant, dans une société française traversée par les questions identitaires, tout semble vouloir la renvoyer à ses origines. Mais quel lien pourrait-elle avoir avec une histoire familiale qui jamais ne lui a été racontée ?
Son grand-père Ali, un montagnard kabyle, est mort avant qu’elle ait pu lui demander pourquoi l’Histoire avait fait de lui un « harki ».
Yema, sa grand-mère, pourrait peut-être répondre mais pas dans une langue que Naïma comprenne. Quant à Hamid, son père, arrivé en France à l’été 1962 dans les camps de transit hâtivement mis en place, il ne parle plus depuis longtemps de l’Algérie de son enfance.
Comment faire ressurgir un pays du silence ?
Dans une fresque romanesque puissante et audacieuse, Alice Zeniter raconte le destin, entre la France et l’Algérie, des générations successives d’une famille prisonnière d’un passé tenace. Mais ce livre est aussi un grand roman sur la liberté d’être soi, au-delà des héritages et des injonctions intimes ou sociales. » Les éditeurs
Prix littéraire Le Monde 2017
Prix Goncourt des lycéens 2017.
Une lectrice :
« Peut-être que le mot « chef d'oeuvre » est excessif et doit être réservé aux romans de Zola, Hugo ou Balzac. Peut-être…
Alors, je vais essayer de vous parler d'un livre magistral, un livre qui habite longtemps le lecteur avec des personnages qui au fil des pages deviennent des compagnons de route pour lesquels on a de la tendresse, qui vous font vibrer et partager leurs souffrances, leurs amours, leurs vies.
Ce livre, c'est « L'art de perdre » d'Alice Zeniter, une saga familiale foisonnante qui débute dans l'Algérie des années 30.
Dans la première partie, nous rencontrons Ali qui, dans sa Kabilie natale, semble promis à un avenir bouché à se casser le dos à essayer de cultiver une terre rocailleuse jusqu'à ce qu'un jour, comme un cadeau du ciel, un pressoir charrié par la rivière croise sa route, manquant de peu de l'estropier.
Dès lors, sa vie se transforme, Ali se lance dans la culture des oliviers et produit de l'huile, les affaires sont florissantes.
Mais ce que l'on appelle pudiquement « les évènements » sont en marche et le destin de bien des hommes et celui d'Ali devenu Harki va basculer, jusqu'à ce qu'un bateau l'emmène sous d'autres cieux.
Dans la deuxième partie, Ali essaie de survivre avec sa famille dans un camp à Rivesaltes et Hamid, son fils va poser des questions qui resteront sans réponse. le père à jamais blessé, garde le silence. Un fossé d'incompréhension va se creuser peu à peu.
Naïma, la petite fille d'Ali, vit heureuse à Paris, jusqu'à ce que les attentats de 2015, l'obligent à se poser des questions sur le passé de sa famille dont elle ignore tout.
Il y a beaucoup d'émotion et d'amour dans ce livre, même si les sentiments restent muets, faute de mots pour dire je t'aime ou je te comprends.
Ce roman poignant évoque avec subtilité et émotion les destins brisés par L Histoire et l'irrationalité des hommes, les séquelles de la colonisation, l'exil, le déracinement, le lourd poids de l'héritage familial mais aussi la force de l'amour filial.
La plume d'Alice Zeniter est élégante, tour à tour musicale et brutale. J'ai tourné les pages avec passion. La fin du livre m'a tiré des larmes.
Et j'ai relu ce livre, à haute voix, cette fois-ci, pour en partager l'émotion avec un proche qui a perdu la vue.
L'oralité transcende la beauté de l'écriture et cette relecture me bouleverse.
Alors « Chef d'oeuvre » ? Oui, je crois que ce roman mérite ce qualificatif. « www.babelio.com