MANKELL Henning
L’HOMME INQUIET, Seuil Policiers, 2010, 551 pages
Roman du genre polar de HENNING MANKELL très réussi avec son style détaillé, élégant, coulant, progressif comme une petite vague qui finit pour nous soulever. Le roman progresse de façon parcimonieuse par petits détails, par petits liens subtils, nous tient en haleine. L’auteur s’attaque aux détails des événements, nous en met plein la vue, nous innonde d’indices, d’hypothèses possibles. Un polar d’une grande minutie. L’auteur relate des événements historiques de la Suède, de sa situation géo-politique qui nous renseigne sur les positions de ce pays face aux puissances étrangères amies et indésirables. Un bon moment de lecture si vous aimez le genre polar.
Gilles Lagrois, Auclair, Québec
*** Pour en savoir davantage, quelques résumés et commentaires.
« Grand-père d’une petite Klara, Wallander a réalisé ses rêves : vivre à la campagne avec son chien.
Après avoir évoqué avec le commissaire la guerre froide et une affaire de sous-marins russes dans les eaux territoriales suédoises, le beau-père de sa fille Linda, ancien officier de marine, disparaît, puis c’est le tour de la belle-mère. Soupçons d’espionnage. Au profit de la Russie ? Des États-Unis ? Parallèlement à la police de Stockholm et aux services secrets, Wallander mène sa dernière enquête. C’est alors qu’il amorce sa propre plongée en profondeur : les années écoulées et les femmes de sa vie défilent. Et la petite Klara devient son ultime balise.
Au-delà de l’intrigue, la force et la beauté du roman résident dans le portrait riche et bouleversant de celui qui se dévoile ici sous la plume de son créateur, Henning Mankell. « source :www.seuil.com
Vous avez lu !
"Par un lecteur : Bernard Daguerre
En annonçant explicitement qu’il donne congés à son héros, l’écrivain suédois Mankell prépare ainsi un livre des adieux. Après 9 aventures, le commissaire Kurt Wallander, de la brigade criminelle d’Ystad, ville située au sud de la Suède et donnant sur la Baltique, connaît au moment d’atteindre la soixantaine, deux évènements qui vont bouleverser sa vie : la naissance d’un bébé, bientôt prénommé Klara, mis au monde par sa fille Linda, le remplit de joie ; peu après il abandonne son pistolet chargé dans le restaurant où il venait de dîner (et boire pas mal). Incapable de se souvenir des circonstances de cette lourde faute professionnelle, il s’inquiète de sa perte inexpliquée de mémoire. Ses supérieurs aussi, qui l’obligent à partir en congé.
La grande enquête qui va tenir le lecteur en haleine tout au long de son demi-millier de pages peut alors démarrer : le beau-père de Linda, Hakan, un officier de marine à la retraite disparaît inexplicablement. Disparition inquiétante d’autant que quelques jours auparavant, il s’était ouvert à Wallander d’un mystérieux incident du temps de la guerre froide, des manoeuvres inexpliquées de sous-marins soviétiques dans les eaux suédoises, événement qui continuait à le tarabuster de manière bien étrange, avait noté notre commissaire. Et pour rendre la chose encore plus complexe, la femme de Hakan disparaît à son tour. Wallander se plonge dans cette enquête, parsemée de découvertes stupéfiantes jusqu’au coup de théâtre final.
Pour écrire toute la force de ce livre, on pourrait faire un recensement de toutes ses beautés : la fluidité du récit et l’élégance de la langue, la dimension universelle des thèmes brassés, le personnage du policier construit et déconstruit dans le même élan. Commençons par Wallander : il est mal en point (diabétique, tension trop forte, alerte cardiaque, tendance à l’embonpoint…faut-il continuer ?).
Il vit seul en pleine campagne avec son chien ; son personnage de solitaire atrabilaire est adouci par la relation forte et permanente qu’il a avec sa fille, l’attention émerveillée qu’il porte à sa toute petite petite-fille. Appréhendant qu’il ne pourra bientôt plus maîtriser sa vie, il sait mobiliser les ressources de son intellect (l’utilisation originale d’un jeu de cartes par exemple) et ses multiples connaissances (un ancien des services secrets de l’ex- RDA, la femme d’un collectionneur de données militaires, tous deux assez schizophrènes) pour avancer dans sa recherche souterraine.
Non seulement Wallander enquête en dehors de toute commande de sa hiérarchie, pendant son repos forcé, puis hors de ses heures de travail, mais aussi de manière symbolique, il enquête sur les profondeurs des mystères sous-marins, comme en contre- écho à l’obscurité qui parfois voile sa conscience. Enfin et surtout cette intrigue porte des ressorts quasi universels : on aimera cette idée de la mer Baltique scène maritime de l’intrigue, sorte de mare nostrum du Nord de l’Europe ( où les protagonistes se déplacent de Copenhague aux îles de la côte suédoise, du ferry qui transporte en Allemagne ou jusqu’en Pologne, ou encore vers la lointaine Lettonie) ; on se souviendra des interrogations jamais refermées sur l’assassinat d’Olaf Palme, les réflexions désenchantées des policiers sur évolution de leur métier (déjà présentes dans les « vieux » polars de Sjöwall et Wahlöö) face aux volontés des politiques, le soliloque moral sur notre monde et ses tendances. Et, pour paraphraser Manchette, on voit bien que la victoire particulière de Wallander ne redresse pas le tort général. »
Livre vivement conseillé par BernarDaguerre…
source :www.bibliosurf.com