DJIAN Philippe
« OH… », Gallimard, 2012, 236 pages
Bon roman dans le style impeccable de Djian qui nous entraîne dans une histoire de famille et d’une femme peu commune. Une famille spéciale il faut dire, une grand-mère de soixante et quinze ans qui veut se remarier, son mari est en prison pour crime d’enfants, une femme séparée qui est victime de viols et un fils de vingt cinq ans qui a une relation avec une nouvelle amie qui a un enfant nouveau né.
Le personnage principal est la femme qui est associée dans une entreprise privée et qui est la victime de viol chez elle à deux reprises mais qui finalement réussit à gérer cette situation rocambolesque et sexuelle. Une femme qui assume sa sexualité, sa vie familliale et réussit dans sa compagnie comme femme d’affaires.
Un bon roman.Une autre vison de la vie d’une femme qui vit ce qu’elle a à vivre à sa manière sans préjugés, sainement et sans y laisser sa peau.
Gilles Lagrois, Auclair, Québec
Roman intéressant et impartial de DJIAN surtout par le principal personnage féminin Michèle épouse, mère et fille qui a une vie en dents de scie, qui assume pleinement les choix qu’elle doit faire dans les changements de sa vie et dans ses différents rôles. Elle va jusqu’au bout d’elle-même et vit au jour le jour sans tenir compte des opinions des membres de sa famille sinon sa vie serait humainement insoutenable.
Pour en savoir davantage :
« Décembre est un mois où les hommes se saoulent…tuent, violent, se mettent en couple, reconnaissent des enfants qui ne sont pas les leurs, s’enfuient, gémissent, meurent… »
«Oh… » raconte trente jours d’une vie sans répit, où les souvenirs, le sexe et la mort se court-circuitent tous instant. » nrf
« Djian réussit très bien à se mettre dans la peau d'une femme de 50 ans. On oublie que c'est un homme qui écrit. "Oh …" est un roman qui parle des vivants. La filiation, l'amour, le sexe, la mort. Djian aborde toutes ces questions charnellement, à travers la vie et les péripéties de ses personnages. »
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“Oh”, c'est l'histoire de Michèle, presque cinquantenaire, qui vient de se faire violer chez elle par un inconnu quand le livre s'ouvre. Elle vit séparée de Richard, son mari, scénariste raté, pendant que leur fils Vincent, sans vrai emploi, vient de se mettre en ménage avec Josie, enceinte d'un dealer en prison.
Sa mère Irène, soixante-quinze ans, a des amants trois fois plus jeune qu'elle et son père est en prison depuis trente ans après avoir commis un crime affreux.
Michèle a une liaison avec Robert, le mari d'Anna sa meilleure amie et son associée dans une boîte de production qu'elles gèrent ensemble. Richard, Lui, se console dans les bras d'Hélène, une standardiste qui pourrait être sa fille.
En dernier, il y a Patrick, un voisin de Michèle, au charme duquel elle n'est pas insensible.
Nous suivons les histoires de cette galerie invraisemblable de personnages une trentaine de jours pendant les fêtes de Noël.
Le viol est donc le point de départ de cette histoire et le premier d'un nombre d'événements qui vont déstabiliser Michèle et bouleverser le semblant d'équilibre qu'elle s'est construite depuis le massacre commis par son père alors qu'elle ne sortait à peine de l'adolescence.
Depuis cette époque, la vie est passée par là, et elle s'est mariée, a fait un enfant, a monté son entreprise, s'est séparée … C'est une femme résolument moderne, forte et indépendante, qui gagne bien sa vie et entretient sa famille, tout en dirigeant son entreprise et en gérant les égos surdimensionnés des un et l'inefficacité des autres.
Alors … comment se fait-il que, après ce viol, elle va se lever, ranger les bibelots, nettoyer le sol, prendre son bain … et continuer comme si rien n'était ? La famille vient dîner le soir même, il y a une pile de dossiers sur son bureau, la vie continue. Bien sûr, Michèle se pose mille questions, cherche à comprendre, à savoir comment faire … mais la vie n'est-elle pas ainsi ? Pendant qu'on se les pose, ces questions, le téléphone continue à sonner, le chat a faim, le loyer reste à payer, il y a les fêtes et les réunions à préparer.
C'est une des choses que j'ai bien aimé dans ce livre, ce mélange de drame (non seulement le viol, mais je ne vais pas révéler d'autres clés de l'histoire) et de quotidien … on ferme les volets, on allume les lumières, on débarrasse la table, le voisin coupe son bois … tout ça rythmé par ces évènements bouleversants qui se succèdent.
Car Michèle vit un véritable tourbillon pendant ces trente de jours, et nous sommes emportés avec elle. le style d'écriture y est pour énormément d'ailleurs. le texte se lit en un seul bloc. Il n'y a ni paragraphes, ni chapitres, pas de blancs. Comme explique Djian Lui-même dans une interview des Inrocks “…dans la belle littérature, il faut commencer la première phrase du premier chapitre cinq points après la marge, alors j'ai décidé dans “Oh…” de la coller à la marge.”
Et cet effet de “bloc” est bien efficace … on est plongé directement dans l'histoire, ça démarre tout de suite, on ne peut pas décrocher car rien ne lâche jusqu'à la fin. Cette fin prend la forme d'un court épilogue, agissant comme un grand bol d'air frais après l'ambiance presque asphyxiant du reste du roman. Et cet “Oh…” final qui, pour moi, est un vrai signe d'apaisement après tant de changements et de ruptures.
Certes, le rythme est un peu oppressant, avec des flashbacks, des trahisons, des mensonges et des révélations, créant parfois un véritable malaise, mais c'est tout à fait cohérent avec ce que vit Michèle. Et le plus gênant est peut-être le fait que nous ne savons pas vraiment pourquoi elle agit de telle ou telle façon. Elle fait souvent le mauvais choix, mais Djian ne fait pas dans la psychologie, et c'est à nous de trouver les réponses (s'il y en a) en s'interrogeant. Ce qui est, avec ce thème de viol comme fil conducteur, plutôt dérangeant, il faut le dire.
C'est le premier roman de Philippe Djian que je lis, donc je ne peux pas le comparer avec ses œuvres précédents. Par contre, j'ai appris que c'est la première fois que son narrateur est en fait une narratrice, et je trouve qu'il se glisse remarquablement bien dans la tête d'une femme.
Certains l'accuseront de relever des fantasmes masculins avec l'histoire de viol et comment Michèle agit quand elle apprend l'identité de son agresseur. Mais d'après les interviews de l'auteur que j'ai lu, je n'y crois pas, je le pense plus honnête que ça.
Pour conclure, je dirais, que malgré le côté invraisemblable de certains éléments de l'histoire, elle tient bien la route. Mieux que ça, elle est percutante, choquante, renversante et superbement humaine. J'ai passé un moment de lecture très intense, parfois dérangeant, j'en suis sortie sonnée mais tellement enchantée d'avoir vécu une telle expérience littéraire » www.babelio.com
« "Oh", c'est bien le cri que l'on se retient de pousser tout au long de cette lente et inexorable descente aux enfers que nous conte si bien Philippe Djian, qui vient de recevoir le prix Interallié.
L'héroïne en effet, approche de la cinquantaine; Elle a bien des soucis avec son ex-mari qui noue une relation avec une femme bien plus jeune que Lui et son fils qui s'amourrache d'une future maman de près de 100 kg dont l'ancien compagnon et père du bébé purge une peine en prison pour trafic de drogue.
Sa mère, la septuagénaire Irène, Lui donne aussi du fil à retordre car elle entretient un gigolo de 40 ans son cadet...
Comme si cela ne suffisait pas, elle est agressée chez elle et son voisin Patrick, sous des dehors bien tranquilles de banquier, cache en fait une personnalité inquiétante.
Et nous apprenons par la suite que le père de notre sympathique héroïne éditrice et productrice avait commis dans le passé un crime épouvantable.
Le récit est magnifiquement rendu, la situation apparaît de plus en plus inextricable.
Les personnages principaux apparaissent comme livrés à eux-mêmes, incapables d'agir sur leur destin, comme des marionnettes emportées par le vent...
Un récit fort et implacable…
on regrette seulement que le thème du viol soit abordé de manière un peu "légère", traité comme un fait banal.
Des personnages féminins intéressants, ce qui fait le point fort du récit. » www.babelio.com une lectrice
Dans son nouveau roman, Philippe Djian détricote les relations d’une famille hors normes. Déroutant et envoûtant.
Par Valérie Trierweiler - Paris Match
« Attention, ceci est une oeuvre littéraire, un livre puissant. Philippe Djian revient avec « Oh… » un roman qui braconne sur des terres défendues. Certes, l’écrivain a coutume de nous conduire là où nous ne l’attendions pas. Ici encore, il fait la démonstration d’une imagination fertile qui oscille entre fantasmes et répulsions. Depuis son culte « 37° 2 le matin » – écrit il y a tout de même vingt-sept ans – et vingt oeuvres plus tard, Djian continue à nous surprendre. Dans « Oh… » (drôle de titre, non ?), on se dit d’abord qu’il y va fort. Sa narratrice, Michèle, à la veille de la cinquantaine, semble mener une vie presque normale. Elle est séparée de son mari et, comme beaucoup de femmes de sa génération, se débat entre une mère qui refuse de vieillir, et un fils, Vincent, qui peine à grandir et à s’assumer. Sans travail, il veut se mettre en ménage avec une jeune femme enceinte dont l’enfant n’est pas de lui. Le géniteur est en prison.
Le banal commence à s’estomper. Et voilà la mère, ou plutôt la grand-mère, qui, à 75 ans, souhaite se remarier. « Je te tuerai, c’est bien simple. Pas besoin de réfléchir », lui rétorque Michèle. Les relations sont tendues, extrêmement tendues. Entre Michèle et sa mère. Entre Michèle et son fils. On apprend très vite l’existence d’un père enfermé dans un asile psychiatrique, depuis des années et des années. Un père dont Michèle ne veut plus entendre parler, un père qu’elle refuse de revoir malgré l’insistance de sa mère. Rien ne semble simple, rien ne semble apaisé.
Il faudra avancer plus loin dans le livre pour apprendre que l’homme en question a tué soixante-dix enfants dans un club Mickey, un accès de folie, il y a plus de trente ans. On comprend les réticences de Michèle. Ses années de jeunesse à vivre au ban de la société, à n’être perçue que comme « la fille du monstre », l’errance avec sa mère – sans argent, sans savoir où elles dormiraient chaque soir – ont fait d’elle une femme méfiante. On comprend ce qui lie les deux femmes ; on admet leur relation faite d’appartenance et de dépendance. De répulsion aussi. Avec le fils, les rapports ne sont pas moins tortueux, mais d’un autre ordre. Michèle ne souhaite que l’indépendance de ce rejeton âgé de 24 ans, tout en lui contestant ses choix, tout en lui niant sa liberté.
Philippe Djian explorele champ de la perversité
Michèle et son ex-mari, Richard, conservent des liens de proximité. Ils sont solidaires comme un vieux couple quand la question du sexe ne se pose plus. Ils s’entendraient même plutôt bien depuis trois ans qu’ils sont séparés. Jusqu’au jour où Richard refait sa vie. C’est toute la question du lien que Philippe Djian aborde dans « Oh… ». Du lien interfamilial d’abord. Celui dont on voudrait se détacher jusqu’à la rupture parfois, sans que ce ne soit jamais possible. Comme le père assassin que sa femme n’a jamais voulu renier quand la fille a voulu gommer son existence. Comme le fils qui veut reconnaître un enfant dont il n’est pas le père. Comme l’ex-mari rejeté mais interdit de bonheur avec une autre. Et puis, il y a cette autre histoire dans l’histoire.
Les premières pages du livre s’ouvrent sur l’agression de Michèle par un homme cagoulé. L’agression se double d’un viol et se renouvelle. Michèle n’en parle pas. Et ce nouveau voisin séduisant qui lui tourne autour. On devine la suite. Enfin, pas toute la suite. Le viol devient le centre du jeu. Oui, du jeu. Un jeu pervers qui mènera loin. Philippe Djian, comme dans certains de ses romans, explore le champ de la perversité. Entre adultes. Comme si cela ne suffisait pas, l’amant de Michèle n’est autre que le mari de sa meilleure amie et associée.
Tout devrait nous inciter à lâcher ce texte. Et pourtant, on le lit jusqu’à la dernière ligne. On attend le prochain rebondissement. On cherche ce que signifie chacun des événements au-delà d’un simple agrément de l’histoire. On y pense encore le livre refermé. On y réfléchit. Sommes-nous passés à côté de quelque chose ? On revient quelques pages en arrière. Trente jours seulement s’écoulent dans la vie de Michèle, pendant lesquels tous les sentiments sont évoqués. Djian, une fois de plus, impose son style et s’impose comme une pièce maîtresse de la rentrée littéraire. Il est Djian, tout simplement.