GRAINVILLE Patrick
BISON, roman, Seuil, 2014, 317 pages,****
La fin d'un peuple: le Rouge.
Un grand roman d'un grand peuple INDIEN, les SIOUX des années 1828 à 1860. À lire par reconnaissance pour un peuple noble qui a marqué l'histoire de notre humanité.
L'auteur relate tel un historien, l'aventure du peintre George CATLIN parmi le peuple SIOUX et les CROWS. Il peint la vie sociale et intime des INDIENS, dépeint avec dignité leur mode de vie, leurs cérémonies, leur vie spirituelle, leurs rites religieux, leur beauté intrinsèque, leur célébration de la vie en harmonie avec la nature .
Un grand roman par un auteur talentueux, impressionnant par son écriture soignée, minutieuse, émouvante.
Gilles LAGROIS, Auclair, Québec
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"En plein soleil, l'eau jaillissait d'un amoncellement rocheux piqueté de saules et de pins. Il s'approcha pour se rafraîchir... quand il vit la robe étalée sur une roche."
"La beauté brute du monde, le vent qui souffle les pins, le soleil frappant le granit rouge."
CUISSES. Elle marche ensuite sur la rive, belle, nue, sans honte."
"Comme si les CROWS leur apparaissaient. CROWS interdits. CROWS plus beaux d'être inaccessibles au commun des mortels. Aujourd'hui, les tableaux les plus intimes de CATLIN sur les CROWS-- toilette, bain, nudité-- sont sertis dans des cadres ovales, ce qui renforce leur caractère clandestin de vignettes pour initiés."
"Pas de SIOUX sans la guerre qui le fonde,l'incarne.C'était cruel, c'était absurde. Mais CATLIN pouvait-il juger les guerriers selon ses propres valeurs?"
"Des enfants jouaient. CATLIN en vit un tout petit auquel un vieil INDIEN, sans doute son grand-père, apprenait à tenir un cheval. Des femmes tannaient, d'autres cousaient, brodaient."
"Car il a vu une escouade d'INDIENS magnifiques chevaucher dans PHILADELPHIE,une brigade de chefs invités à WASHINGTON pour être exhibés et trompés une nouvelle fois."
"Avec vous, voilà encore des marchands et des menteurs.FORT PIERRE. On y vendait beaucoup trop d'alcools aux INDIENS."
"Tel était le fastueux programme qui, dès 1832, se dessinait dans la tête hallucinée de CATLIN: des dizaines de tribus à rencontrer, à voir...à décrire."
LES SIOUX. " Les danseurs grognent, rugissent, mugissent, se contorsionnent et ruent, galopent comme un troupeau chassé.
LES SIOUX sont des hommes BISONS, des silhouettes hallucinatoires arrachés du fond de la prairie."
Chasse aux bisons." Une même lance de chair, de tambours, de fourrure, un même arc tendu de flèches de chair, de lances, de crinières.Une même colline à la fourrure ondulante, rompue,bossuée. Les esprits chevauchent les BISONS, ils chevauchent ÉLAN, ORAGE.LES PÈRES, LES GRANDS-PÈRES du monde."
"Le village a changé d'aspect. Il est habillé de bison frais. Les rôtis de bison cuisent. Les femmes cousent les peaux, brodent les robes et les jambières neuves."
"Les SIOUX vénéraient trois vertus: la bravoure, la force d'âme et la générosité."
Pour en savoir davantage:
Résumé :
"Philadelphie, 1828. Promis à une belle carrière d'avocat et de peintre mondain, George Catlin voit une délégation d'Indiens se rendre à Washington pour négocier des traités. Il est ébloui par la superbe des cavaliers. Bientôt, le peintre renonce à ses portraits de citadins huppés, il quitte sa femme, sa ville, son confort, enfourche son cheval pour galoper le long du Missouri et du Mississippi à la rencontre de dizaines de tribus. La grande prairie est vierge. Nuls colons, nuls cow-boys. Des millions de bisons. Catlin est le premier à saisir sur le vif, armé de sa palette et de son pinceau, l'épopée des Indiens. Il réalise d'inoubliables portraits, recueille une incroyable moisson d'objets, son fameux "musée indien" qui fascinera quelques années plus tard George Sand et Baudelaire. Bison raconte le séjour de Catlin chez les Sioux, les aventures d'un village et de ses héros singuliers. L'imagination vient volontiers à la rescousse du document pour recréer, incarner le grand rêve de cet Américain sans préjugés, de ce fou d'Indiens, luttant pour sauvegarder leurs visages magnifiques et condamnés."Les éditeurs
Un lecteur:
"Il s'agit ici d'une biographie romancée du peintre états-unisien George Catlin (1796-1872), qui parcourut de 1821 à 1860 les vastes espaces correspondant grosso modo aux États-Unis actuels pour y vivre auprès des tribus indiennes – surtout les Sioux dans le présent récit – et y peindre tout à la fois des scènes de chasse, des portraits, des paysages, avant que tout cela ne soit anéanti par les colons blancs nés sur place ou venus d'Europe.
Avec l'auteur Patrick Grainville, la qualité d'écriture est toujours au rendez-vous, même lorsqu'il "se limite" comme dans ce récit, à une relation relativement "documentaire" appuyée sur une documentation précise (le peintre Catlin a laissé de nombreux écrits ainsi que ses carnets de voyage).
Il se concentre ici principalement sur les années 1832-1837 (cf pp. 32-33), avec des échappées sur les disparitions à venir, comme l'inventaire des défaites indiennes face au déferlement des blancs (cf pp. 58-59) ; son récit est exempt de toute mièvrerie, de tout romantisme rousseauiste, à l'image des qualités qu'il décèle chez son personnage (cf p. 32). A plusieurs reprises, il rend compte des contacts entre les indiens et les marchands blancs apportant la dégradation des moeurs, comme par exemple avec l'alcoolisme (cf pp. 123-128).
Il a un véritable talent pour rendre des scènes très visuelles, comme la chasse aux bisons ou les "immenses vols de grues et d'oies des neiges" (p. 73), mais nous sommes loin ici de la recherche fouillée sur les ressorts profonds de l'acte de peindre, effectuée avec "L'atelier du peintre" (voir recension).
Notons les comparaisons avec les autres peintres qui traiteront de sujets similaires, comme Alfred Jacob Miller (p. 32), Bodmer (p. 57), John James Audubon (pp. 128-130), William Jacob Hays (p. 276), Frederic Remington (p. 277). Au passage, je relève une allusion furtive à Bethsabée (p. 106).
Une lecture plaisante et agréable, même si elle nous rappelle que les États-Unis furent fondés sur la destruction de contrées restées quasiment inviolées jusqu'à l'arrivée des colons, sur l'anéantissement de la faune sauvage dont principalement les gigantesques troupeaux de bisons et surtout, surtout, sur le génocide systématique des tribus indiennes.
Un livre à lire et recommander." www.babelio.com